samedi 26 janvier 2008

Lenny Bruce, un moraliste du rire



(texte publié dans le livre Rire de Résistance édité par Le Théâtre du Rond-Point et Beaux-Arts Magazine en novembre 2007)

Né en 1925 à Long Island, issu d’une famille juive, Lenny Bruce se débarrassa bien vite de sa jeunesse en devenant soldat en Europe pendant la seconde guerre mondiale. À son retour du front, il fonda sa propre église et s’autodésigna pasteur ; il fit du porte-à-porte et récolta de l’argent pour une léproserie en Guyana. Mais son Jésus n’était pas assez convenable, alors la police l’arrêta. 
Son humour iconoclaste et son éloquence n’étant appréciés ni par l’Eglise ni par les tribunaux, il trouva asile dans les cabarets. Il put ainsi continuer à prêcher ; il entreprit de guérir les lèpres du racisme et de l’hypocrisie.
La société ne le toléra pas longtemps ; elle n’avait pas encore compris qu’il est plus efficace d’encenser ou d’ignorer les irréductibles. Des policiers arrêtaient Lenny Bruce à la fin de ses représentations. On l’accusait de proférer des obscénités. Pour lui, la seule obscénité c’était le silence. Il s’attaquait à tous les pouvoirs et dévoilait la haine derrière la respectabilité. Il était juif, noir et indien à la fois. Cette guerre contre l’injustice et l’humiliation ne lui laissait aucun répit. Il n’avait pas l’intention de déposer les armes.
Sa femme était strip-teaseuse. Lui exhibait son âme. Un abîme le séparait du public. Sur scène, il se trouvait en équilibre ; comme un funambule, il mettait sa vie en jeu en marchant sur un fil. La drogue et l’alcool sont les seuls anges-gardiens sur qui l’on peut compter dans ces cas-là. Bob Dylan a écrit une chanson en hommage à Lenny Bruce où, par une phrase, il dit tout : « Il a combattu sur un champ de bataille où chaque victoire fait mal ».
Selon un critique, un de ses rares admirateurs à l’époque, il ne parlait pas : il faisait du jazz. Il improvisait avec sa voix, ses émotions et ses idées. C’est en jouant qu’il se créait. Il découvrait parfois ses monologues au moment même où il les prononçait. Lenny Bruce était un artiste. Dans ses one-man-show, l’humour se mêlait à la politique, la grâce poétique à la dénonciation. Il se moquait du succès et de la reconnaissance. Les rires et les applaudissements ne l’ont jamais corrompu. Il ne cherchait pas à plaire à n’importe quel prix. Il méprisait les compliments de ceux qui croyaient trouver dans ses spectacles de quoi conforter leur bonne conscience progressiste. Il n’hésitait pas à engueuler son public, ni à l’insulter. Une telle indépendance coûte cher : il perdit son métier, sa femme, sa maison.
Aujourd’hui la censure n’est plus nécessaire. Les comiques font des sketchs sur le téléphone portable, leurs amours ou la cigarette. On jette Lenny Bruce en prison chaque jour où l’on ne reprend pas son flambeau. Il n’est pas une relique de la génération beatnik. Il fait partie de notre trousse de secours humaniste. Il est vivant si nous le voulons. Je voudrais que l’on se souvienne de lui comme d’un honnête homme. C’est beaucoup moins fascinant que son image de rebelle scandaleux. Non, il n’était pas scandaleux, ni vulgaire. C’était un héritier de La Fontaine et de Chamfort.
Laissons-le terminer. À la fin d’un spectacle à New York, il s’adressa ainsi au public : « Je suis désolé si je n’ai pas été très drôle ce soir. Parfois je ne suis pas drôle. Je ne suis pas un comique. Je suis Lenny Bruce ».

mercredi 23 janvier 2008

dorothy parker


lettre à Dorothy Parker, pour la revue décapages en 2005 ou 2006 je ne sais plus, quant au mois... (à chaque numéro un écrivain écrit une lettre à une de ses idoles)

Chère Dorothy Parker,
Dieu merci vous êtes morte. Je peux ainsi vous dire que je vous aime. La mort est une belle invention, elle débarrasse de la migraine et des factures, et permet de parler sans timidité à ceux qui nous sont si proches. La mort ne sépare pas, c’est idiot cette idée. Au contraire, elle rend possible les rencontres. C’est la vie qui sépare, les obligations, les peurs, l’éloignement géographique et social, l’orgueil. Si j’avais vécu dans le New York des années vingt, nous nous serions manqués. Je n’ai pas ce don pour la destruction qui était le passeport nécessaire pour vous approcher. Vous êtes morte, je peux vous parler sans craindre de vous flatter ou de rougir.
Si je vous avais rencontré j’aurais voulu vous sauver. Vous protéger. Vous dire de poser cette bouteille de whisky de contrebande et d’arrêter de sortir avec des crétins. Vous n’auriez pas aimé ça. Moi j’aurais été triste.
Peu de gens le savent, mais vous avez inventé Manhattan. Vous y avez dispersé votre humour et votre détresse, votre génie a changé son architecture. Avant vous, les feuilles des érables ne portaient pas encore ces couleurs sanguines qui enchantent Central Park en automne. Vous avez beaucoup bu pour casser la trop grande géométrie des rues et avenues, vous avez fumé pour leur léguer la brume.
Vos nouvelles possèdent une profondeur qui ne s’affiche pas, elles sont tendres, violentes, drôles et désespérées à la fois. Vous ne jouez pas à l’artiste. Vous dîtes : il faut se mettre à sa table de travail et bon dieu arrêtez de se plaindre et écrire. Vous vous moquez de ceux que vous appelez les « rotariens littéraires ». Quand tellement de romanciers écrivent comme des journalistes, vous nous avez donné des articles qui sont des chefs d’œuvres.
Malgré vos mots d’esprit et votre virtuosité sarcastique, vous étiez discrète et peu sûre de vous. Le doute est la récompense de l’artiste disait votre ami Hemingway. On vous croit misanthrope, non ce n’est pas ça, vous étiez simplement pudique et ne supportiez pas les bonnes âmes et les nobles sentiments dont on s’habille trop facilement. Vous avez été de tous les combats, en 1937 en Espagne du côté des Républicains, et toujours contre la ségrégation raciale, contre la répression politique, contre les clergés et ceux qui sont convaincus de ce qu’ils sont. Vous êtes morte, paraît-il. Ce n’est pas grave. C’est une façon plus subtile d’être en vie.

dimanche 20 janvier 2008

en fait

je commence vaguement à comprendre comment tout ça marche.
je vais m'abstenir de raconter ma vie sur ce blog, je vous épargne ça, mais (pourquoi pas) je compte y ranger (comme dans un coffre un peu secret), les différentes nouvelles, articles etc que j'ai écrit au fil des ans. il y en a peu, alors ça ne risque pas de vous voler trop de temps. (je sais, un jour, ça serait pas mal si je construisais tout un site web perso, mais n'allons pas trop vite).

mercredi 16 janvier 2008

blog fantome

ceci est un blog un peu fantôme dont je ne me sers pas (c'est une longue histoire, mais je devais avoir un blog pour créer un truc (profil?) par rapport au blog collectif "la petite marchande de bombes" donc voilà je ne comprends mais voilà).
martin page